• L'identité masculine en question

    Un article d'Alain LEDAIN

    Pour construire le texte ci-dessous, plusieurs sources ont été utilisées :

    L'identité masculine en question - Anselm Grün - Editeur :  Médiaspaul  , Paris 
    Ainsi soient-ils. Sans de vrais hommes, point de vraies femmes... -     Vecchiali, Hélène - Ed. Calmann-Lévy , Paris 
    Conférence au Collège des Bernardins : Hommes - Femmes : quelle identité ? 
    Chroniques du dimanche 2009-2010 Le texte ci-dessous au format PDF

    Avant de poursuivre nos chroniques, il me semble important de revenir sur mes précédentes prestations.

    Les réactions essentiellement – mais pas exclusivement – féminines, très positives et passionnées à ma deuxième intervention sur la la question : " Où sont les hommes ?..." m’obligent à revenir brièvement sur ce thème.

    Je reste profondément persuadé que les changements dans l’Eglise et la société dépendent grandement des hommes, de leur sortie du silence et de l’absence, et d’une bonne compréhension de leur identité masculine.

    Au plan plus personnel (nous sortons momentanément du cadre de ces chroniques), mes entretiens avec quelques jeunes femmes m’ont montré qu’elles attendent de vrais hommes – contrairement à notre contexte sociétal qui cherche leur féminisation –. Elles regrettent qu’au pire, les hommes n’osent pas les aborder, qu’au mieux, ils ne persévèrent pas dans la conquête de leur cœur, qu’ « ils ne prennent pas position ». L’une d’elle me confiait : « ce n’est pas parce qu’un homme m’invite deux fois au restaurant qu’il doit croire qu’il m’a gagnée, que je suis tombée amoureuse de lui. Il doit me conquérir. »

    Ça y est ; le mot est lâché : « Conquérir ». Le vocabulaire du combat et de la guerre.

    Certains s’accordent à dire que, pendant des millénaires, l’homme s’est défini par sa capacité de protéger la femme et l’enfant, donc par la guerre. L’homme était celui qui partait à la guerre et rentrait en héros, avec la gloire et l’honneur. Aujourd’hui, avec l’après 1968, avec le rejet de la guerre et de la violence (à laquelle est assimilée la sexualité masculine), avec l’arrivée du pacifisme, il y a, parallèlement, rejet de la virilité. L’homme est devenu une créature étiolée, moribonde, au pouvoir et à l’autorité partagés. Un homme me parlait de « castration » en imitant le mouvement des ciseaux !

    Parallèlement, au sein de la famille, l’homme refuse d’être la loi, d’être celui qui dit non parce qu’il pose des limites ; il refuse d’être désapprouvé. Il veut être aimé comme la mère, il veut séduire ses enfants.

    C’est une analyse de notre contexte. Le thème est trop discuté, trop disputé pour que je prétende apporter la vérité. Quoi que l’on en pense, les hommes ont besoin de retrouver le sens des responsabilités, leur « identité de conquête» au risque de ne plus passionner les femmes qui les entourent…

    Dans un débat , une phrase a retenu mon attention : « Dans les relations entre jeunes gens, les garçons se comportent comme des filles, c’est-à-dire ont des réactions de filles, ont des discours de filles ; ce qui désespère les jeunes femmes. » Je laisse ces questions : qu’est ce qu’un comportement de filles ? Qu’est ce qu’une réaction de filles ? Qu’est ce qu’un discours de filles ? En bref, qu’est qui désespère les jeunes femmes ?

    Sachons que la Bible offre des figures masculines (des images archétypiques) auxquelles nous pouvons nous identifier (nous les hommes). Ainsi, pour n’en citer que quelques unes : Moïse est l’archétype du chef, Samson du guerrier, David du roi, Elie du prophète, Jean-Baptiste de l’homme sauvage . A tout homme de trouver son archétype, son modèle en étant conscient qu’en chacun, il y a des travers, des « zones d’ombre ».

    Images archétypiques et zones d’ombre
    Elie est l’archétype du prophète ; un prophète énergique, passionné, enthousiaste  qui dénonce l’injustice avec courage au prix, éventuellement, de sa propre vie.
    Un danger de l’identification à cet archétype est l’enivrement du sentiment de puissance. Après avoir égorgé les 400 prophètes de Baal, Elie a du rencontrer le Dieu de douceur et de silence présent dans la brise légère. Le but : être mu, non par la puissance, mais par Dieu qui nous pousse.
    Vous remarquerez que dans certains milieux évangéliques, très avides de la puissance de Dieu, on a un vrai problème avec le silence !

    Enfin, selon le livre des Proverbes  : « Le fer s'aiguise contre le fer ; l'homme s'aiguise face à son compagnon. » C’est pourquoi il est si important que les hommes se retrouvent entre eux et osent « croiser le fer », c’est-à-dire se confronter, se parler, s’entraider, avec pour buts :

    - d’entrer en contact avec leur masculinité,
    - d’éveiller leur énergie masculine et de l’orienter vers des secteurs d’engagement (nous voici revenu au cœur de nos chroniques !),
    - de développer une spiritualité en cohérence avec leur nature virile.

    Les femmes, armée imbattable du Seigneur

    Une remarque pour en finir (momentanément ?) avec ce sujet : alors que je préparais cette intervention, un e-mail est tombé dans ma boite aux lettres. Il concernait un séminaire pour femmes organisé par une grande église de la région parisienne. Le thème : « Les femmes, l’armée imbattable du Seigneur ».

    En tant qu’homme, je dois avouer que ce titre m’a mis mal à l’aise. Comme écrit précédemment, "guerre" et "combat" sont des termes attachés à la masculinité. La confusion des genres a-t-elle atteint l’Eglise ? (Je suis volontairement provocateur !)

    Les questions

    1968 EST-IL UN ÉVÉNEMENT NÉGATIF ?

    1968 a marqué la fin d’une société machiste. En ce sens, 1968 n’a pas été négatif. Mais, il y a eut un « effet balancier » ; on est passé d’un extrême à l’autre : La cause féministe est allée trop loin. Certaines femmes ont cherché à transformer les hommes à leur ressemblance. Une erreur, car « égalité » n’est pas « même-itude » et, en définitive, elles en sont frustrées trouvant plus difficilement de vrais hommes.

    D’un autre côté, les hommes ont construit une société à l’image de la mère et certains d’entre eux se montrent absents en se réfugiant dans le travail mais, « pas de chance », là aussi, ils y retrouvent parfois des femmes en position d’autorité…

    POUR QUE LES HOMMES RETROUVENT LEUR IDENTITÉ, FAUT-IL SOUHAITER LA GUERRE ?

    Évidemment non ! Après plusieurs millénaires d’identification à « celui qui part à la guerre pour défendre femme et enfants », l’homme doit trouver d’autres images archétypiques (d’autres modèles).

    LA MASCULINITÉ EST-ELLE ATTACHÉE À LA VIOLENCE ?

    Une fois encore, la réponse est négative. La vraie masculinité n’est pas attachée à la violence. Par contre, les frustrations développées par des hommes en insécurité quant à leur identité est génératrice de violence.

    Dans notre société occidentale féminisante, entre 1981 et 2001, le nombre de détenus pour viol ou autres agressions sexuelles a été multiplié par 7 environ  et 48% des détenus pour crimes le sont pour crimes sexuels.

    Ces statistiques me font penser au roi Hérode, personnage à la fois dépendant des femmes – il est prêt à donner la moitié de son royaume à Salomé – et meurtrier : il fait assassiner  Jean-Baptiste.

    Non, ce n’est pas la masculinité qui engendre la violence mais bien plutôt son déficit chez les hommes !

    LA MASCULINITÉ, EST-CE UNE QUESTION DEVANT ÊTRE ABORDÉE DANS L’EGLISE ?

    Oui et pour plusieurs raisons. La principale d’entre elles  est que nous sommes des êtres incarnés (nous ne sommes pas de purs esprits) et des êtres sexués. Les questions identitaires sont celles qui nous atteignent les plus profondément.

    Albert Camus réclamait des chrétiens qui sortent de l’abstraction. Ça y est ; c’est fait !

    L’Église a souvent tenu un discours moraliste sur la sexualité et sur la confusion des genres (homosexualité). De plus, et sans doute à cause du célibat des prêtres et des sœurs, elle a donné l’image d’un rassemblement de personnes mal identifiés sexuellement. Il faut le redire : devenir chrétien ne rend pas asexué !

    Attention : je ne dis pas que les prêtres et les sœurs sont mal identifiés sexuellement. C’est l’image que l’on en donne parfois. Il est possible toutefois que des personnes en mal d’identité sexuelle se soient réfugiées dans le sacerdoce du prêtre ou de la sœur pour échapper à leur crise, à leurs frustrations. Mais est-là une bonne échappatoire ?

    Plutôt que des discours moralistes auxquels nos contemporains sont hermétiques, optons pour la démonstration par l’exemple – je devrais dire par l’exemplarité –. Soyons de vrais hommes et de vraies femmes… ce qui n’empêche pas un comportement irréprochable !

    Comme dans tous les autres domaines, nous, chrétiens devons être « la tête et non la queue », nous devons être les initiateurs de la réconciliation «hommes-femmes ».

    Étant un homme, je me suis montré incisif en espérant créer des réactions parmi les hommes et susciter en eux (en moi) un désir de changement. Nous avons un travail à opérer ensemble.

    Parallèlement, une femme pourrait susciter un débat identique à celui que nous sommes en train de clore et poser, entre autre, la question du niveau d’exigence des femmes par rapport aux hommes.

    En complément

     Les hommes n'existent plus (A 31 ans, l'écrivain Tristane Banon regarde les hommes se "féminiser". Et reste célibataire.)

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  • Commentaires

    1
    Brundan
    Lundi 26 Octobre 2009 à 09:45
    Il n'y a pas de vraies femmes s'il n'y a pas de vrais hommes ; mais il ne peut y avoir de vrais hommes s'il n'y a pas le vrai Christ dans leur vie.
    2
    Farah
    Lundi 26 Octobre 2009 à 15:46

    Il m'a semblé absolument incongru que vous citiez Zemmour dans votre chronique car pour cet écrivain, l'essentiel est de vivre dans une société "qui doit encenser son ego d’homme!" Pourquoi ne pas citer Soral pendant que vous-y êtes!

    De plus, je tiens à vous signaler que ce n'est guère avec plaisir que les femmes "partent en guerre" elles ne font qu'agir là où les hommes n'ont pas le courage d'agir!

    Il est aisé d'accuser les femmes de "chercher à transformer les hommes à leur ressemblance" alors que bon nombre d'entre  eux depuis des décennies n'assument en rien leurs responsabilités!

    Quant au fait, que les hommes se retrouvent face à des femmes en position d'autorité sur leur lieu de travail, c'est encore inexact! Citez-moi donc toutes ses entreprises où les femmes parviennent à de hautes responsabilités ou occupent de hautes responsabilités ? Elles sont en minorité!
     
    Bref, vous me direz que c'est votre analyse, okay mais dans ce cas, cela me gêne que le débat se déroule uniquement sur Internet et qu'on soit obligé de vous écouter donner votre point de vue à l'église sans pouvoir vous répondre immédiatement de façon spontanée et non préparée...

    3
    EthiqueChrétienne Profil de EthiqueChrétienne
    Lundi 26 Octobre 2009 à 20:03
    J’avoue que Zemmour n’est pas une bonne référence. J’ai cité une de ses phrases, non pour faire réagir les femmes, mais pour que les jeunes hommes s’interrogent sur leur masculinité.
    Quant au désir des femmes de transformer les hommes à leur ressemblance, c’est la thèse d’une femme : Hélène Vecchiali.
    Ceci étant, je suis tout à fait d’accord avec vous : les hommes ne prennent pas leurs responsabilités.
    Je suis désolé : mon souhait n’est pas de créer des polémiques stériles et, je me répète, mon désir est de faire sortir les hommes de leur absence et de leur silence.
    La réconciliation hommes-femmes supposent que nous nous y mettions des deux côtés : ça n’est manifestement pas gagné. Vous ne concédez rien.
    Ce que j’aimerais savoir est ce que vous attendez PRECISEMENT des hommes.
    4
    benoitM
    Lundi 26 Octobre 2009 à 21:33
    Bonsoir Alain, depuis le début de ta chronique le poême de Kipling se rapelle à moi, certes la barre est élevée mais nous aimons le sport... et bien des poêtes ont su transmettre une hardiesse pleine de générosité dans le coeur d'hommes de valeurs et la joie d'être compris sans dire un mot.
    Mais je crois que cela est valable pour chaque âme, le livre des psaumes et bien des cantiques nous le rapellent.
    Amitiés...

    Si tu peux voir détruit l'ouvrage de ta vie
    Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir,
    Ou perdre en un seul coup le gain de cent parties
    Sans un geste et sans un soupir ;

    Si tu peux être amant sans être fou d'amour,
    Si tu peux être fort sans cesser d'être tendre,
    Et, te sentant haï, sans haïr à ton tour,
    Pourtant lutter et te défendre ;

    Si tu peux supporter d'entendre tes paroles
    Travesties par des gueux pour exciter des sots,
    Et d'entendre mentir sur toi leurs bouches folles
    Sans mentir toi-même d'un mot ;

    Si tu peux rester digne en étant populaire,
    Si tu peux rester peuple en conseillant les rois,
    Et si tu peux aimer tous tes amis en frère,
    Sans qu'aucun d'eux soit tout pour toi ;

    Si tu sais méditer, observer et connaître,
    Sans jamais devenir sceptique ou destructeur,
    Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître,
    Penser sans n'être qu'un penseur ;

    Si tu peux être dur sans jamais être en rage,
    Si tu peux être brave et jamais imprudent,
    Si tu sais être bon, si tu sais être sage,
    Sans être moral ni pédant ;

    Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite
    Et recevoir ces deux menteurs d'un même front,
    Si tu peux conserver ton courage et ta tête
    Quand tous les autres les perdront,

    Alors les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire
    Seront à tous jamais tes esclaves soumis,
    Et, ce qui vaut mieux que les Rois et la Gloire
    Tu seras un homme, mon fils.

    Le texte est bien entendu à ne pas lire au 1er degré !
    5
    Jean-Pierre
    Mardi 27 Octobre 2009 à 07:18
    Cher Alain,

    Merci pour tes chroniques qui me parlent: j'ai été élevé dans un foyer où le père était absent et la mère m'a très tôt signifié que la sexualité masculine était "sale". Depuis j'ai l'impression d'être un "poids" pour la société, quelqu"un dont on ne sait que faire. C'est un vrai débat que tu poses: Avons nous le droit en temps qu'hommes d'être des êtres sexués et qu'est ce que ça veut dire dans l'Eglise?

    J'ai plein de questions et pour l'instant peu de réponses encore. Pourquoi ne pas créer au sein de l'église des groupes de parole "hommes" avec une forme similaire à ce qu'avait fait Guy Corneau pour parler de ça et commencer à se retsrousser les manches?

    Bien à toi,
    Jean-Pierre 
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    6
    Farah
    Mardi 27 Octobre 2009 à 14:12

    Je vous concède que le débat sur la question est nécessaire... j'attends toujours les noms de ces "nombreuses" entreprises dirigées par les femmes!

    7
    EthiqueChrétienne Profil de EthiqueChrétienne
    Mardi 27 Octobre 2009 à 14:59
    Réponse pour Farah :
    Je vous concède qu'il manquait dans mon intervention un mot important : parfois. « Là aussi, ils y retrouvent parfois des femmes en position d’autorité…»
    Je pourrais citer Anne Lauvergeon, PDG d'Areva (premier groupe nucléaire mondial) mais ce serait de la bien mauvaise foi que de nier la discrimination dans le monde de l’entreprise.

    De plus, tenant compte d'une de vos remarques (tout-à-fait juste), j'ai ôté la référence à Eric Zemmour dans le texte ci-dessus.

    Effectivement, un débat constructif est nécessaire et je vous remercie d'y participer avec vigueur.

    Mes différentes conversations me montrent qu'au delà des pensées sur le sujet, il y a beaucoup de blessures : blessures infligées par les hommes aux femmes et, réciproquement, blessures infligées par les femmes aux hommes. Les « armes » employées ne sont pas les mêmes mais elles laissent de profondes cicatrices.

    Parallèlement au débat (qui a son importance et doit être poursuivi), il y a un pardon à nous accorder réciproquement.
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