• Liberté de penser, liberté de croire, liberté religieuse, liberté d’exprimer et de manifester

    Premier Manifeste des éveilleurs
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    Le manifeste en version courte...

    Signez ce manifeste !

    L'actualité récente montre qu'une menace inquiétante pèse aujourd’hui sur les esprits en France: une forme de laïcité autoritaire et sectaire gagne l’ensemble de l’espace public et, par capillarité, entend s’imposer à toutes les couches de la société.

    Ainsi, la vie religieuse des citoyens devrait être réduite au seul périmètre de la sphère privée, ce qui viendrait entraver toute manifestation sociale et publique des religions. A terme, si tant est que cela fût possible, c’est la dissolution du phénomène religieux qui semble visée.

    La république a aboli la religion d'Etat permettant à toute conscience de croire ou de ne pas croire. Ainsi elle valorisa la liberté d'enseignement, idéalisa l’épanouissement de l’individu hors des dogmes, sans lui interdire d’y adhérer. Depuis, sur les frontons de nos mairies a été arboré fièrement le mot liberté, liberté qui fut pour l’homme une véritable émancipation, un affranchissement, le choix de vivre en conscience les convictions intimes qui l’animent sans être menacé lorsqu’il les partage. La liberté devait faire face à l’obscurantisme et à toute tentative d’aliénation de la pensée. L’homme de foi quant à lui pouvait se réjouir de cette situation qui garantissait que les manifestations de cette foi n’étaient plus le fait d’un conformisme légaliste ; cette foi pouvait s’en trouver purifiée et l’incroyant ou le non-croyant protégé.

    Deux siècles après la Révolution, nous voyons  poindre l’émergence d’une nouvelle idéologie qui impose un LA à la pensée et atteint par là même la liberté de penser, la liberté de religion, si bien que les choses semblent s'inverser : de l'intolérance religieuse passée, de laquelle émergea l'idée d'une laïcité plutôt équilibrée, nous glissons aujourd'hui vers une laïcité intolérante, stigmatisante et, discriminante parce qu'antireligieuse.  

    Nous, « éveilleurs », voulons ici exprimer notre étonnement relatif à la brutalité de ce postulat qui traitent la religion comme si elle était un danger pour les valeurs républicaines. Nous exprimons notre inquiétude, voire notre méfiance envers ce postulat qui semble avoir pour conséquence la volonté d'imposer une nouvelle religion d’Etat, paradoxalement comprise comme « athéisme d'Etat ». Nous y voyons une manœuvre politique par laquelle le gouvernant s'arrogerait indûment le droit de former les consciences,  voire de les formater pour changer en profondeur les mentalités, cela dès la prise en charge des enfants à l'école et le plus tôt possible, tout en niant le rôle naturellement dévolu aux familles. Cette mainmise de l' « Etat-Providence » qui se fait l'idole de la pensée juste est absolument inacceptable ! L'allié le plus sûr de cette situation violente et choquante sur le fond, c'est la « douceur » et le caractère légal de sa mise en place : tout cela contribue à anesthésier l'opinion. Cette forme adoucie de totalitarisme qui est une nouvelle forme d'obscurantisme, nous la dénonçons.

    Pour dénoncer, il faut d'abord décrire : c'est la raison pour laquelle nous choisissons de revenir sur plusieurs événements qui nous paraissent inquiétants voire alarmants du fait de ce qu'ils induisent ou de ce qu'ils impliquent (I). Après ce rappel des faits, nous verrons que le fondement de nos institutions – qui garantissent le vivre-ensemble – se trouve menacé (II). Nous terminerons ce manifeste par une présentation plus détaillée de qui nous sommes – les Eveilleurs, auteurs de ce manifeste –, de notre raison d'être et de nos intentions pour libérer, dans l'espace politique, la sphère de l'agir.

    I/ Plusieurs faits constatés :

    Afin d’éviter de rester dans le fantasme ou la paranoïa, nous souhaitons nous adosser à quelques faits, locaux ou nationaux, que nous relisons et que nous relions à l’idéologie ambiante afin de mieux comprendre les raisons que nous avons d’être inquiets, voire d’être en colère, de façon raisonnée certes mais bien réelle :

    1-Un fait local : le Sénateur-Maire de Conflans-Sainte-Honorine (78) a décidé de mettre à l’écart  Mme Lalanne, responsable de plus de 70 agents d'entretien au sein de la mairie, sur le motif qu'en offrant un calendrier publicitaire comportant une citation biblique à plusieurs collègues, elle aurait porté atteinte à l'ordre public et enfreint le principe de la laïcité.[1]

    Un internaute (M. Gabriel Kara) rappelle dans une lettre ouverte au maire de la commune que le respect du principe de laïcité est louable à condition de « l'appliquer avec justesse et justice; or nous sommes nombreux à vous le dire, votre décision est disproportionnée, et pourrait s'apparenter à de la discrimination religieuse. »

    2- Le remaniement d'une haute instance nationale : Le Comité Consultatif National d'Ethique vient de connaître un profond remaniement (la majorité des sièges vient d’être renouvelée ; M. Hollande a choisi des personnes proches de sa sensibilité politique et éthique). le Président de la République qui désigne les personnalités « appartenant aux principales familles philosophiques et spirituelles » du CCNE ne souhaite plus consulter les institutions religieuses pour ces nominations. A titre d'exemple, le pasteur Louis Schweitzer pasteur et professeur d'éthique recommandé par la Fédération protestante (il siégeait depuis 4 ans et pensait être renouvelé dans sa mission) a été remercié et remplacé par Marianne Carbonnier-Burckard, historienne protestante.[2]

    Les débats actuels sur la bioéthique et la volonté de poursuivre un changement de civilisation en profondeur annoncé par Mme Taubira, Ministre de la Justice, font tout de suite saisir les intentions du gouvernement qui veut sans doute par avance éviter toute forme de controverse sur ces questions. Pourquoi les différentes instances religieuses devraient-elles, par avance se taire sur ces questions où elles sont peut-être celles qui ont le plus de sagesse ? L’anthropologie religieuse ne fait-elle pas partie de la culture humaine ? Eradiquer le mot « race » de la Constitution a-t-il du sens lorsque, d’un autre côté, on met en place une forme de « racisme » intellectuel antireligieux ? Vers quel remodelage des mentalités s’achemine-t-on ; en vertu de quelle conception de l’homme ? Ultimement, de quoi ce gouvernement a-t-il peur ?...

    Force est de constater en tout cas que les modalités d’action d’un gouvernement peuvent à la fois être douces, démocratiques ainsi que tyranniques voire totalitaires[3], dans la mesure où elles induisent un remodelage des mentalités sur la base d’un nivellement idéologique (idéologie de la sécularisation du religieux que l'on ne cesse arbitrairement de vouloir comprendre comme violent par essence et intolérant).

    3- La remise en cause de fêtes et traditions liées aux racines chrétiennes de notre pays : La relation quasi obsessionnelle de ce gouvernement envers le phénomène religieux nous interpelle. Beaucoup d’efforts sont déployés, ces derniers mois, pour faire la chasse aux –phobes, si bien qu’à force de postuler la « haine » et la « peur » partout (signification de phobos en grec), on légitime une certaine action sécuritaire, censée protéger le citoyen d’un hypothétique ennemi. Cela ressemble fort à la suspicion d’un « ennemi objectif », mécanique qui n’est pas étrangère aux idéologies totalitaires.

    Le « credo laïc » que la France doit continuer d’arborer fièrement, selon l'expression de Dounia Bouzar, (anthropologue spécialiste du fait religieux récemment nommée à l'Observatoire de la laïcité par le Premier Ministre) n’échappe pas à cette logique obsessionnelle. Assise sur la certitude de la bien-pensance et de la tolérance, elle a proposé le remplacement de deux fêtes chrétiennes par Yom Kippour (fête juive) et l'Aïd (fête musulmane). Même si elle a récemment tempéré ses propos[4], l’ouverture au phénomène religieux ici évoquée n’est qu’une apparence : plutôt que de reconnaître une valeur intrinsèque et véritable aux traditions religieuses, il s’agit plus de prôner le relativisme (et donc l’inanité) du phénomène religieux[5].

    A ceux qui nous reprocherait d'être dans le procès d'intention, nous répondrons que l'alternative est la suivante : ou bien l'action du gouvernement n'a aucune cohérence dans son approche du phénomène religieux, ou bien (si son approche de la laïcité est cohérente, comme nous allons continuer de le montrer) l'intention d'un affaiblissement voire d'une éviction du phénomène religieux est bien réelle ; par conséquent, au nom de la liberté de croire et de penser, il y a des raisons de s 'inquiéter.

    La façon de faire est tout à fait maline : le relativisme religieux est le meilleur moyen d'affaiblir les religions et leur revendication de vérité. Ainsi, en dressant les religions (et les fidèles) les uns contre les autres, nous avons là le meilleur moyen de les affaiblir : diviser pour mieux régner ! Le risque est donc bien celui de la division et de la querelle inter-religieuse ; c'est la plus mauvaise façon de réagir ! Ainsi l’accusation d’intolérance se trouverait-elle vérifiée ! Elle ouvrirait la route à ce  « credo laïc » que certains appellent de leurs vœux, c’est-à-dire, pour les plus radicaux, à une religiosité de substitution.[6] Même si une telle religiosité, séculaire et politique par essence, n’aurait comme sol qu’un sable mouvant (la société et la mobilité de ses mœurs), elle serait, d’un point de vue politique, lourde de conséquence, voire catastrophique puisque c’est la liberté religieuse et la liberté de croire qui se verraient remises en question.

    L’idée de Mme Bouzar n’est pas sans rappeler une certaine duplicité, non étrangère à la sagesse toute pragmatique enseignée par Machiavel, que l’on retrouve chez nos actuels gouvernants. Que veut-on dire ? D’un côté, l’on considère que la religion est obscurantiste, intolérante, ce qui vient disqualifier toute tradition religieuse, y compris l’Islam ; d’un autre côté, on aura, envers les musulmans notamment (dont on sait qu’ils ont en nombre voté pour l’actuel président), une attitude de complaisance. La même attitude de rejet et de « drague » a eu lieu récemment de la part du Ministre Valls à l’égard du monde chrétien protestant[7]. Par contre, une tradition qui  jamais ne fait l’objet de compassion de la part des politiques ni de la part de l’opinion publique (les propos sur les réseaux sociaux sont à cet égard révélateurs), c’est la religion catholique. Il semble qu’il y ait, au niveau de la bien-pensance collective, au moins de l’indifférence si ce n’est un rejet, voire de la haine  à l’égard de nos racines culturelles chrétiennes. Aucune compassion n’est par exemple exprimée publiquement, politiquement, envers les persécutions menées contre les chrétiens coptes d’Egypte ou ceux de Syrie. Ce propos ne porte implicitement aucune accusation à l’égard de nos amis musulmans ; il veut seulement souligner le caractère dommageable de ce qui constitue une sorte de haine collective de soi, une négation du soi collectif, un suicide culturel collectif dans l'auto-négation de nos racines culturelles puisque le christianisme en fait partie.

    Notre passé religieux conflictuel semble déterminer assez largement l’idée que nous nous faisons aujourd’hui de la religion et de la laïcité, y compris dans sa forme la plus radicale telle qu’elle s’exprime aujourd’hui. Il serait temps de faire la paix avec notre histoire, de prendre de la distance et de considérer notre passé de façon apaisée afin de vraiment le dépasser. A l’inverse de cela, le gouvernement accentue la tendance en proposant une laïcité radicalisée. Une telle attitude ne peut, qu’en réaction susciter une expression elle aussi radicalisée de la religion ; ce  qui forcément se traduira dans le domaine politique. Ce n’est pas parce qu’on met le feu aux poudres que l’on peut ensuite, en toute légitimité se présenter comme le pompier ou le sauveur de l’histoire. Au lieu d’une posture plus modeste et plus raisonnable par rapport au phénomène religieux qui a toujours existé (et qui existera toujours), le gouvernement semble vouloir en apporter une solution par sa dissolution. Pour ce faire, il faut que « la religion » soit présentée comme un problème. Nous avons toujours été allergiques aux "solutions" définitives ou bien "finales"...

    II/ Les institutions de la République malmenées :

    1-Une dérive laïciste depuis  deux décennies :

    Les faits évoqués ci-dessus ne sont pas exhaustifs. Ils témoignent d'une relecture et d'une interprétation des textes fondateurs de la République plus que discutable. La dérive d’une laïcité militante, belliqueuse voire intégriste n’est pas seulement le fait de l'actuel gouvernement, même si celui-ci y apporte une large contribution.

    L’année 1989, avec l’affaire des voiles de Creil, a sans doute été un tournant.[8] Jacques Chirac, en faisant voter une loi en 2004 encadrant (c’est-à-dire interdisant) le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics, a participé à ce durcissement du ton à l'égard des différentes traditions religieuses.

    Nicolas Sarkozy n'a pas été en reste en faisant voter en 2010 une loi sur la dissimulation du visage dans l’espace public.

    Enfin, le zèle dans ce domaine des sénateurs de l’actuelle majorité socialiste est à souligner avec leur proposition de loi relative à l’application du principe de laïcité aux assistantes maternelles accueillant les enfants à domicile, au prétexte que « les parents peuvent avoir une  nounou qui soit « neutre » sur le plan religieux. »[9]

    2-La laïcité agressive du gouvernement actuel :

    Plus proche de l'exécutif, comment ne pas s'inquiéter des propos de l’actuel Ministre de l’Education Nationale M.Peillon lorsqu'il dit que  « toute l’opération consiste bien, avec la foi laïque, à changer la nature même de la religion, de Dieu, du Christ, et à terrasser définitivement l’Eglise. Non pas seulement l’Eglise catholique, mais toute Eglise […] »[10] ? Comment ne pas être consterné par la radicalité du propos ; par l'inintelligence du fait religieux aussi ?

    Jean Baubérot, historien et sociologue des religions écrivait il y a peu que la laïcité était censée « permettre de vivre dans la paix sociale des rapports différents à la sécularisation selon qu’on soit proche ou distancié de la religion (…). La laïcité n’a donc pas à imposer aux gens de se séculariser car cela devient une atteinte à leur liberté de conscience. Or, actuellement, on confond laïcité et sécularisation, et le Haut Conseil à l’Intégration le revendique fièrement puisqu’il déclare que ‘dans la société sécularisée, il n’est pas possible de faire ceci ou cela’. Cela est totalement anormal, ce n’est plus de la laïcité mais quelque chose qui comporte des éléments d’un athéisme d’Etat. On veut donc forcer certaines populations à se séculariser, ce qui d’une part est totalement inefficace puisque l’histoire montre que chaque fois qu’on a voulu porter atteinte à la liberté de religion on a produit des raidissements chez les gens, et d’autre part cela est une mécompréhension totale de l’intention de laïcité, et va même à l’encontre de la loi de 1905. »[11]

    3-L’esprit des instituions dévoyé, trahi :

    Que fait-on de l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 qui affirmait que « nul ne doit être inquiété pour ses opinions, mêmes religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi » ; et puisque le droit d’avoir une opinion sans avoir celui de s’exprimer n’est pas la liberté, que fait-on de  l’article 11 de la même déclaration qui soulignait que « la libre communication des pensées et des opinions et un des droits les plus précieux de l’homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. »

    L’ordre établi par la loi, ce n’est pas l’athéisme, des convictions anti-chrétiennes ou antimusulmanes : Maître Eolas, avocat au barreau de Paris, signale sur son blog que « la vue d’une kippa ou d’un hijab ne trouble pas l’ordre public, même si elle vous trouble vous ; dans ce cas, ce n’est pas la religion le problème mais votre intolérance. »

    Quid de l’article premier de la Constitution française de 1958 qui stipule que « la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale (…) Elle respecte toutes les croyances. » La loi de 1905 de séparation de l’Eglise et de l’Etat, quant à elle, affirme à l’article 1 que « La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes. » Par conséquent, non seulement la laïcité assure la liberté de culte, mais l’Etat doit se donner les moyens de la garantir. « Ainsi, explique Eolas, une procession sur la voie publique est légale, mais encore la République doit assurer la sécurité et l’ordre de cette procession, en fermant la rue à la circulation, et installer les déviations nécessaires. De même que la force publique doit écarter toute manifestation visant à empêcher l’exercice d’un culte, comme l’irruption d’une foule au milieu d’un office. »

    Et si l’article 2 de cette loi de 1905 dit que « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte », elle introduit immédiatement ensuite une exception en déclarant que « pourront toutefois être inscrites auxdits budgets les dépenses relatives à des services d’aumônerie et destinées à assurer le libre exercice des cultes dans les établissements publics tels que lycées, collèges, écoles, hospices, asiles et prisons. »

    Par conséquent, le principe de la séparation de l’Eglise et de l’Etat va de pair avec celui de la liberté religieuse ; et si l’Etat n’a pas de religion officielle ou n’en favorise aucune en particulier, il est tout à fait sain, rappelle Vianney Permalien[12] dans son article Et si on (re)parlait de la laïcité ?, que « lorsque l’Etat vote des lois, des débats ont lieu, et toutes les références utiles à ces débats sont convoquées, philosophiques, politiques, morales et évidemment religieuses. »[13]

    Faudra-t-il enfin se référer à l’article 35 de la Déclaration des droits de l’homme de 1793 qui affirme que « quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs. » Sans aller jusqu’à partager la radicalité de cet article, nous avons ce devoir d'insurrection intellectuelle et morale, ce devoir de nous indigner et de dénoncer l’injustice ; car il n’y aura pas de paix durable et véritable sans justice et sans vérité.

    Nous, éveilleurs, nous apprêtons à dénoncer les manœuvres ineptes de ce gouvernement en particulier, non pas parce que nous rêverions d'un monde parfait mais parce que nous nous devons de tenir une parole responsable, mature, ferme, ouverte à tous, réfléchie ; cela pour combattre le relativisme, non par dogmatisme mais parce que cela relève de notre rôle de citoyen que de parler sur la place publique quand le politique lui-même se met à déraisonner.

    Pour terminer, nous citerons ce texte déclamé par un romancier de renom pour lequel le mot ‘liberté’ faisait sens : Il s’était totalement dévoué au service de la conscience et de la vérité. Dans un contexte d’antisémitisme, Emile ZOLA écrivit à la jeunesse une lettre vibrante qui ne saurait être enfermée à son seul contexte. Transposons-la à notre époque où l’on tente d’anesthésier les esprits et d’arracher la conscience des enfants à celles de leurs pères et de leurs mères, et nous serons surpris par sa force et son actualité. 

     « Jeunesse, jeunesse ! Souviens-toi des souffrances que tes pères ont endurées, des terribles batailles où ils ont dû vaincre, pour conquérir la liberté dont tu jouis à cette heure. Si tu te sens indépendante, si tu peux aller et venir à ton gré, dire dans la presse ce que tu penses, avoir une opinion et l'exprimer publiquement, c'est que tes pères ont donné de leur intelligence et de leur sang. Tu n'es pas née sous la tyrannie, tu ignores ce que c'est que de se réveiller chaque matin avec la botte d'un maître sur la poitrine, tu ne t'es pas battue pour échapper au sabre du dictateur, aux poids faux du mauvais juge. Remercie tes pères, et ne commets pas le crime d'acclamer le mensonge, de faire campagne avec la force brutale, l'intolérance des fanatiques et la voracité des ambitieux. La dictature est au bout. »

    Alors résistons et ne permettons pas à la tyrannie qui nous guette de vaincre. Soyons des hommes libres, éveillés dans leur conscience.

    III/ Qui sommes-nous ?

    1- Notre identité :

    Le groupe des « éveilleurs » est constitué de philosophes, sociologues, de socio-économistes, d'enseignants, de pédopsychiatres, de journalistes, de médecins, de juristes, de religieux de différentes confessions ; globalement de personnes qui réfléchissent et s’informent, s'instruisent et veulent instruire. Ce manifeste est lui-même le fait d’une co-écriture.

    Nous nous sommes donné le nom d' « éveilleurs  des consciences » depuis notre première rencontre à Reims en Mai 2013. En même temps, nous ne sommes pas une association géographiquement loc­alisée ; nous n’avons par exemple pas de siège social. La raison en est que, face à une pensée en mouvement qui se déploie sous la forme d'un rouleau compresseur et que l'on peut aisément qualifier d'idéologie, même si c'est sous les traits masqués de la bien-pensance qu'elle avance, nous souhaitons répondre par une pensée elle-même en mouvement, non pas une contre-idéologie mais à l'inverse une pensée souple, réactive, ouverte, indépendante du convoi de la majorité des opinions ou de la pensée dominante ; bref, c'est par la pensée vive, vivante, dialectique parce qu'elle dialogue vraiment que nous voulons contribuer à contrer ce qui relève de l'idéologie mortifère, individualiste, relativiste, consumériste qui oriente les choix de nos dirigeants contemporains.

    En choisissant cette appellation d’éveilleurs de consciences, nous ne prétendons pas avoir une vision plus claire ou une représentation plus exacte des contextes particuliers que nous sommes amenés à vivre.  En réalité l’éveil de nos consciences est venu de la lecture de grands textes de la littérature, de l’intuition d’auteurs à la pensée magistrale qui, par leur inspiration, transcende le temps. Nous songeons à ces écrivains, observateurs de leur époque, qui nous ont permis de comprendre le cours des événements, le déroulement d’une histoire parfois gouvernée par une conception de l’homme qu’il faut toujours parfaire, tailler et transformer. Nous pensons à ces philosophes, poètes, romanciers, à leurs textes exhumés dont l’intelligence éclaire d’un jour nouveau la période contemporaine et les tragédies dont elle est parsemée, histoire qui pourrait connaître d’autres drames si l’éveil n’était pas engagé.

    2- Nos valeurs :

    De ce fait, nous ne voulons pas être enfermés dans un courant de pensée, un parti, un mouvement, une thématique, une appartenance philosophique ou religieuse. Libres de témoigner de leur foi en l’homme ou en Dieu, les éveilleurs  revendiquent, non pas une appartenance confessionnelle ; simplement la liberté que tout un  chacun a de penser ou de croire comme il l’entend, en accord avec ses convictions profondes. C'est parce que ces convictions profondes ne sont pas arbitraires et qu'elles peuvent s'argumenter que nous avons décidé de prendre la plume ou la parole, collégialement, sous des formes différentes et en convoquant divers médias.

    Les valeurs communes des éveilleurs sont celles d’un humanisme authentique : non pas un humanisme abstrait ou de façade, fondé sur le bon sentiment qui, au final, ne fait que masquer une indifférence effective et un mépris de ce que tout un chacun peut vivre.

    Un humanisme relié au réel  qui tienne compte de la personne dans toutes ses dimensions (affective et sensible, intellectuelle, spirituelle), voilà ce que nous revendiquons depuis la pluralité de nos approches. Nous ne souhaitons pas, par conséquent, faire l’impasse sur la vulnérabilité et sur la précarité qui nous constituent. Prendre en compte la différence de tout un chacun, sans mépris ni rejet de personne ; commencer par considérer la différence sexuée, qui nous particularise comme homme ou comme femme (et qui n'est pas un accident culturel), voilà ce qui initie notre combat contre la confusion généralisée.

    3- Nos objectifs :

    Nous avons l’ambition de partager nos analyses, nos réflexions auprès de nos concitoyens, sans distinction de classe sociale, d’origine, de sexe, de pensée ou de croyance religieuse ; cela afin d’informer, voire de former l’esprit critique de nos contemporains à se forger en vérité.

    C’est au nom de la liberté de conscience et de la liberté de penser que nous souhaitons partager nos réflexions,  dans un esprit de bienveillance, d’humilité, d’écoute et d’ouverture ; pour cela, nous agirons sur la base de l'utilisation des medias à notre disposition (réseaux sociaux, conférences, voie de presse, écrite, audiovisuelle). Au nom de cette même liberté de penser, nous nous donnons la possibilité d’intervenir sur n’importe quelle thématique y compris là où on ne nous attendra pas, sans être annexé à un credo, à une pensée unique fût-elle celle du monde mediatico-politique ou de la « pensée dominante. Nous sommes d'ailleurs étonnés du silence parfois « assourdissant » des médias, des élus, des syndicats, des philosophes en regard d’un climat liberticide qui gagne subrepticement notre pays, qui enveloppe l’ensemble de ses consciences. C'est cet étonnement qui nous fait parler ; c'est la défense du patrimoine culturel, contre le déracinement naïf, stupide et uniformisant que nous voulons agir, tout cela afin de restaurer un véritable du vivre ensemble où il fera bon de penser et d'agir ensemble.

    Contrer les valeurs bobos du « chacun pour soi » et les revendications individualistes et égoïstes anesthésiantes ne nous amène pas non plus à vouloir être intrusifs et à mener une croisade morale d'ingérence. Que chacun soit libre, c'est ce que nous chérissons comme valeur fondamentale ; mais que l'on apprenne à concevoir que tout ne se vaut pas (contre le relativisme) ; bref, que l'on donne vraiment au peuple des éléments qui permettent de discerner quant aux décisions collectives, voilà ce  qui nous tient à cœur.

    Passionnés de discussion et d’ouverture à l’autre, c’est de façon raisonnée que nous voulons intervenir pour éviter, sur des sujets graves, de ne laisser s’exprimer que le pathos et l'ignorance. Sans être détenteurs de la vérité, nous savons, sans fausse modestie, ne pas être dénués de qualités réflexives, et nous souhaitons les partager largement.

    Si vous vous sentez proches de la démarche qui est la nôtre, n’hésitez pas à prendre contact avec nous afin d’étoffer le cercle de gens qui réfléchissent et qui veulent faire part de ce qu’ils ressentent, cela afin de lutter contre l’uniformité lénifiante ! Toutes les compétences sont les bienvenues !

    Signez ce manifeste !


    [1] Madame Sandra Blasiak, Présidente de l'Association Familiale Protestante « Maranatha » qui édite le calendrier déclaré  suspect ( !) s'est exprimée dans une lettre ouverte adressée le Mardi 24 septembre 2013 au Sénateur-Maire de la commune de Conflans-Sainte-Honorine, M. Philippe Esnol. Dans cette lettre publiée dans l'AFPM de Conflans Achères, la Présidente exprime sa consternation face au fait que les Associations Familiales Protestantes, partenaires reconnus de l'Etat français au sein de l'Union Nationale des Associations Familiales, seraient considérées comme fauteuses de trouble à l'ordre public au sein de cette mairie. Mme Blasiak signale de plus que, si un verset biblique paraît gênant, il faudrait se rappeler que ce livre [la Bible] « fait partie intégrante des programmes de l'Education Nationale, pour les classes de 6ème, 5ème et Terminale, sans oublier les études supérieures littéraires, qu'elles soient historiques ou linguistiques. »

    [2] Sur cette éviction des religieux et sur celle du pasteur Schweitzer en particulier, cf. l'article publié dans le magazine la Vie du 24/09/2013, propos recueillis par Henrik Lindell.

    [3] Nous n'employons pas le terme « totalitaire » gratuitement : on lira avec profit le tome III des Origines des totalitarismes de Hannah Arendt. Notre époque n’est pas à l’abri, malgré la prétention qui est la sienne de se croire plus évoluée que toutes les précédentes, de tendances totalitaires qui déjà infusent la société. C’est notre rôle d’éveilleurs que de les mettre à jour, de les dénoncer et de les combattre.

    [4] En disant qu’il ne s’agissait que d’une pensée, pas d’une proposition. cf. www.rtl.fr/actualites/infos/article/dounia-bouzar-nuance-ses-propos-sur-les-fetes-chretiennes-7764840563

    [5] Abdallah Zekri, président de l’Observatoire contre l’islamophobie et membre du bureau exécutif du Conseil français du culte musulman ne se laisse pas duper par cette idée généreuse : « Il est tout à fait normal de penser aux autres communautés. Mais il faut juste rajouter deux jours fériés, et non remplacer des jours. Sinon, on va encore dire ‘ils veulent déshabiller Pierre pour habiller Mohammed.’ » L’abbé Grosjean quant à lui secrétaire général de la Commission éthique et politique du diocèse de Versailles, dit qu’il « faut arrêter de bousculer les repères auxquels les Français sont attachés (…) Ce calendrier est le fruit d’une histoire, d’une culture, un reflet de ces racines chrétiennes qui font partie de notre patrimoine. »

    [6] Si Madame Dounia fait ici preuve de prudence en atténuant ses propos, l’éminent membre du gouvernement qu’est le Ministre de l’Education Nationale, M.Peillon n’y va pas, quant à lui, de main morte, pour redéfinir le concept de laïcité à l’école. Il s’agit, selon le Ministre qui ne recule devant rien, de faire advenir une nouvelle religion comprise comme  religion  athée. Voici ce qu’il écrit dans son ouvrage, La Révolution n’est pas terminée : c’est à l’école qu’il revient de briser le cercle des déterminismes pour « être la matrice qui engendre en permanence des républicains pour faire la République, République préservée, république pure, république hors du temps au sein de la République réelle ; l’école doit opérer ce miracle de l’engendrement par lequel l’enfant, dépouillé de toutes ses attaches pré-républicaines  va s’élever jusqu’à devenir le citoyen, sujet autonome. C’est bien une nouvelle naissance, une transsubstantiation qui opère dans l’école et par l’école, cette nouvelle Eglise, avec son nouveau clergé, sa nouvelle liturgie, ses nouvelles tables de la Loi. La société républicaine et laïque n’a pas d’autre choix que de « s’enseigner elle-même » d’être un recommencement perpétuel de la République en chaque républicain, un engendrement continu de chaque citoyen en chaque enfant, une révolution pacifique mais permanente. » (p. 17) M. Peillon ajoute que ce qui manque au socialisme pour s’accomplir comme la pensée des temps nouveaux, c’est une religion nouvelle « Donc un nouveau dogme, un nouveau régime, un nouveau culte (…) afin qu’une nouvelle société prenne la place de l’ancienne.» (p. 149). « La laïcité elle-même peut alors apparaître comme cette religion de la République recherchée depuis la Révolution. » (p. 162) « C’est au socialisme qu’il va revenir d’incarner la révolution religieuse dont l’humanité a besoin, en étant à la fois une révolution morale et une révolution matérielle, et en mettant la seconde au service de la première. » (p.195)… Certes, cet ouvrage a été publié en 2008, mais les récentes déclarations ou publications du Ministre montre que sa pensée n'a, sur le fond, absolument pas changé.

    [7] Cf. l’article du journal La Croix à l’adresse suivante : www.la-croix.com/Actualite/France/Manuel-Valls-rassure-les-protestants-qui-ont-le-sentiment-de-ne-pas-etre-assez-reconnus-2013-09-27-1026588#.Ukl6

    [8] Pour rappeler cet événementiel (et pour d’autres éléments), nous nous appuyons sur l’article publié à l’adresse suivante : http://deshautsetdebats.wordpress.com/2013/09/21/et-si-on-reparlait-de-la-laicit/. Voici ce qui eut lieu : en septembre 1989, trois lycéennes d’un établissement de Creil se sont présentées revêtues du hijab. La direction de l’établissement a refusé de les recevoir si elles n’enlevaient pas ce foulard. Elles refusèrent au nom de leur foi. Le Ministre de l’Education Nationale a saisi le Conseil d’Etat pour avis, espérant obtenir de la plus haute juridiction administrative sa bénédiction pour excommunier les élèves. Pourtant, dans un avis du 27 novembre 1989 (http://wwwrajf.org/spip.php?article1065), le Conseil d’Etat rappelle que l’obligation de neutralité ne s’applique qu’aux agents et en aucun cas aux usagers du service public, protégés par l’article 1° de la loi de 1905. La seule limite est l’ordre public (pas de provocation, de pression, de prosélytisme, de propagande). Le port du foulard ne doit pas empêcher de suivre des cours. Les tenants de la ligne dure du laïcisme ont cependant fini par avoir gain de cause dans la mesure où l’interprétation du terme « ostentatoire » (dans l’avis du 27/11/1989) a fait que le hijab devait être considéré comme tel, si bien qu’il était licite de l’interdire.

    [9] Cf., pour cette proposition de loi, le lien suivant : http://www.liberation.fr/societe/2012/01/18/le-senat-adopte-une-proposition-de-loi-controversée-sur-la-laicite_789286.

    [10] Vincent Peillon, Une religion pour la République : la foi laïque de Ferdinand Buisson,  Le Seuil, 2010

    [11] Cf. http://www.lemondedesreligions.fr/entretiens/la-laicite-en-france-un-atheisme-d-etat-30-01-2012-2207_111.php - Il ajoute la chose suivante : « En 1905, le catholicisme dominant était ce que les historiens appellent un catholicisme intransigeant. Or, la loi de 1905 n’a pas du tout dit que le catholicisme devait se ‘républicaniser’, devenir un catholicisme modéré, libéral, etc. Il a simplement été stipulé que le catholicisme n’était plus la religion officielle en France, et que chacun devait vivre sa foi comme l’entendait, dans le respect des autres et de la tolérance civile. (…) Ce n’est pas la République qui décidait de quoique ce soit. La meilleure preuve c’est que l’Etat a refusé d’interdire le port de la soutane dans l’espace public, et ce sont les prêtres eux-mêmes qui ont, pour la plupart, après Vatican II, abandonné la soutane. La République n’a donc rien imposé. »

    [12] Vianney Permalien est professeur de sciences économiques et sociales. Il publie ses textes sur le blog « Des hauts et débats » (http://deshautsetdebats.wordpress.com/).

    [13] Cf. note 1. Celui-ci ajoute : « Les religions et leurs représentants ont donc non seulement le droit d’exprimer leur avis sur n’importe quelle loi votée ou en cours de vote, mais il est même tout à fait normal, et démocratiquement sain, que des valeurs issues des religions (à commencer par le troisième terme de notre devise, que la République n’a certainement pas inventé, étant entendu que pour être frères, il faut un Père…) influenceront l’élaboration des lois, tant qu’elles sont débattues selon le processus démocratique normal et qu’elles n’ont pas pour finalité ni pour moyen de favoriser l’une ou l’autre des croyances.

    Culturellement, la religion, surtout la religion chrétienne en Occident, a légué un patrimoine (architectural, artistique, etc.) qui a une valeur historique indéniable. La reconnaissance et la protection de ce patrimoine à un titre culturel ne s’oppose évidemment pas à la laïcité tant qu’elle ne conduit pas à privilégier une religion sur une autre. Il est donc parfaitement stupide, par exemple, de refuser de financer une crèche ou un sapin de Noël, en cédant à quelques lobbys sous prétexte de laïcité. Il l’est tout autant de s’opposer au financement public de mosquées nécessaire pour garantir la liberté de culte. »

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  • Commentaires

    1
    is@
    Lundi 14 Octobre 2013 à 20:19

    merci pour votre action.

    2
    Lundi 14 Octobre 2013 à 21:54
    Camille Fornello

    Il est évisent que la vaillante va reprendre & relayer ce permier manifeste des Éveilleurs, en incluant le lien à Éthique Chrétienne…

    Très belle énergie, renouvellante.

    J'adhère…

    Camille Fornello
    pour La Vaillante

    3
    LEMARIÉ
    Vendredi 18 Octobre 2013 à 05:59

    je suis de tout coeur avec vous.

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