• Réflexions sur la barbarie

    Un texte de Jean l'Amandier

    Jean l'Amandier est un des auteurs du site des Eveilleurs de conscience. Il lance ici un avertissement à notre société occidentale policée, à la France, pourvoyeuse de leçons de démocratie : la barbarie nous guette. Premièrement parce qu'elle se niche dans le cœur de chacun de nous. Le livre de la Genèse rapporte comment le péché est entré dans le monde et avec lui la violence. Deuxièmement, parce que la barbarie resurgit sous des formes inattendues, déguisée sous les habits de l'humanisme et du progrès. La culture ne protège pas nécessairement de ce fléau. Le remède est à la fois dans une réconciliation de l'Homme avec son Créateur et dans le renoncement à toute forme de vengeance. N'ayons pas peur des mots ! Ce texte est prophétique ; il met en garde. Puisse-t-il être écouté !

    Alain LEDAIN


    ***

    Je veux ici remercier un ami cher qui par sa relecture, m’a conduit à approfondir l’analyse de la barbarie dans des aspects et des dimensions qui ne réduisent pas aux approches définies par le monde occidental. Je veux ici remercier Cédric l’Auxerrois qui a pris la peine de me relire et d’apprécier le contenu de cette pensée…

    ***

    Notre époque assiste à une forme d’accélération de son histoire ; le pire est le rapprochement d’une dissolution totale de ces civilisations, civilisations qui fuient vers le consumérisme, le nihilisme, le technicisme, ou le fondamentalisme.

    Il est frappant que dans ces périodes de crise, de relever la propagation de la violence, de l’empilement des maux qui viennent submerger les nations. Ouvrons le journal et c’est l’étalement de l’horreur qui se répand sur la terre. Même l’Europe à ses portes est en proie à des exactions et à des déchirements qui lui font craindre le pire.

    N’avons-nous pas finalement engendré le lit de la barbarie en abandonnant les valeurs morales, les repères, les attaches, les piliers qui nous faisaient discerner le Bien et le Mal. Cette époque de relativisation a accouché les idéologies les plus extrêmes, celles de déconstruire l’homme, ou les plus fondamentalistes, celles l’aliénant.

    Ce constat contemporain nous renvoie plusieurs millénaires en arrière à ce récit de la Genèse qui depuis la chute de l’homme, cette rupture avec Dieu est entrée dans un cycle de violence. Cycle qui commença avec Caïn : ce dernier assassine son frère. Pourtant Dieu entend casser ce cycle pour ne pas engendrer des générations de meurtriers; Il protège Caïn comme la manifestation d’un premier signe de sa grâce.

    La violence telle qu’elle est décrite dans le livre de la Genèse, est devenue l’un des maux qui couronne les autres calamités traversant l’humanité. Mais qui en est responsable ? La Bible déclare que toute chair porte cette responsabilité : c’est le commentaire extrait du livre de la Genèse au chapitre 6, verset 11.

    « Toute chair est corrompue, la terre s’est remplie de violence ». La violence ne résulte pas ainsi et en soi d’une catégorie d’hommes. Intrinsèquement et structurellement toute chair porte en elle cette dimension de corruption et de violence qui en est l’aboutissement.

    La violence est quelque part destructrice et les traumatismes l’accompagnant, dévastateurs. La violence est autant du fait d’individus que d’organisations ou d’états. Avortements, crimes, terrorisme, génocide sont les illustrations de la violence menée à son paroxysme et ce à différentes échelles, de l’individu à l’état.

    La violence est une forme de corollaire de la barbarie.

    Les sociétés violentes sont imprégnées d’une forme de nihilisme de la pitié, une contre-humanité. La violence est-elle alors la traduction de la barbarie ou le retour à la barbarie primitive ?

    La dimension même de la barbarie est devenue une expression qui a été au cours des derniers mois utilisée à de nombreuses reprises par les médias et sur réseaux sociaux, pour évoquer la cruauté de l’Etat Islamique (L’EI), la monstruosité, l’inhumanité d’hommes qui sous couvert d’une idéologie s’emploie à imposer une conception religieuse et ultra légaliste de leur monde au mépris des cultures, des valeurs, des croyances d’autres peuples, d’autres humains.

    L’expression de cette barbarie brutale, atroce secoue l’entendement et les consciences à l’aune d’un XXIième siècle en proie à de profondes mutations culturelles, sociétales, écologiques, politiques. Siècle soudainement secoué par des images féroces qui traduisent l’insensibilité et la bestialité d’hommes qui s’excluent du coup du genre humain, tant les actes commis nous font horreur, abîment et blessent l’image même de l’homme lui-même image de Dieu, d’un Dieu compassionnel.

    Le mot barbare revient sur toutes les lèvres, mais les mots mêmes sont impuissants et révèlent parfois leurs limites. L’emploi du mot barbare couvre deux notions que déclinent la cruauté et l’archaïsme. Cette cruauté est devenue une forme même d’inculture poussée à son paroxysme mais associée à l’archaïsme. L’absence de culture n’a pas toujours caractérisé ceux que l’on qualifiait de barbares.

    Contrairement à une idée reçue la Barbarie n’est pas toujours l’inculture

    L’histoire récente nous renvoie pour mémoire à l’idéologie Nazie et certaines figures cruelles de cette idéologie inhumaine ont été éprises de cultures. Ces mêmes nazis ont porté au pinacle des œuvres qui ont marqué l’humanité, voire même jusqu’à les protéger.  Le savoir civilisé, soit disant policé de l’Europe n’engendra-t-il pas d’une certaine manière un monstre, le monstre lui-même célébré par le philosophe Heidegger qui ne se cacha pas de partager les thèses nazies.

    Montaigne, dans le chapitre de ses Essais intitulé « les cannibales » nous évoque avec stupeur un paradoxe sur la culture anthropologique : Le plus barbare n’est pas nécessairement celui que l’on se figure. Ainsi le plus sauvage n’est pas nécessairement celui que l’on a coutume de caractériser à l’aune de nos constructions culturelles et des représentations de notre civilisation qui impactent et influent ces mêmes représentations.

    Le cannibalisme n’est pas ainsi l’exclusivité ou l’apanage des hommes que l’on qualifie habituellement de primitifs, une forme de « cannibalisme » peut aussi caractériser les civilisations dites les plus avancées.

    Dans sa vision critique Montaigne juge en parlant de sa propre civilisation que les cannibales du royaume s’avèrent bien plus barbares que ceux du royaume des cannibales.

    « Les cannibales du royaume sont spécialistes en trahison, tyrannie, cruauté et déloyauté, accusant les « barbares » d’attitudes qui se révèlent pourtant moins graves que les leurs, et ceci sans démarche d’introspection. »

    Pour poursuivre son analyse Montaigne juge les guerres de religion notamment l’inquisition et fait valoir qu’elles ne sont pas plus civilisées que les rituels d'anthropophagie des cannibales, « mangeurs de chair humaines ».

    La barbarie est une aliénation de l’être humain comme différence

    Mais pour autant sans relativiser la notion de Barbarie, nous osons aborder la notion de barbarie comme l’expression même de la violence, une violence qui est le mépris de l’autre, de l’humain, une violence qui est tout simplement la négation de l’autre, l’aliénation de l’être humain comme différence.

    La barbarie qui est une forme de puissance aliénante, est une façon de gommer les différences, d’imposer une forme de totalitarisme nivelant les autres au nom même d’une croyance, d’une idéologie. Il faut alors exécuter le bouc émissaire qui porte en lui ce que je hais comme symbole de l’altérité ou de la dissemblance. L’eugénisme est en soi une forme de barbarie, quand elle dicte qui doit vivre ou est digne d’être.

    La barbarie se traduit ainsi par une forme totalitaire de rejet absolu, une stigmatisation des populations voire même des êtres parmi les plus vulnérables, les plus fragiles, une exclusion violente de l’être humain dans ce qu’il peut incarner à travers son histoire, son identité, sa croyance, sa naissance, ses infirmités, son handicap. Comme l’exprime Fabrice Hadjad dans le livre la foi des démons, cette forme de barbarie atroce « gît dans le mal et a l’angoisse du bien ».

    Le monde occidental pointe la barbarie des autres civilisations, mais sa civilisation n’est pas en soi exempte d’en porter également les germes.

    Je reprends ici l’intégralité d’un texte écrit par Fabrice Hadjadj  :

    « Après Auschwitz et Hiroshima : le pire de notre époque est l’imminence de la destruction totale. Peut-on encore parler d’un Dieu bon et puissant ? S’il est bon, il est faible, vu qu’il n’a pas pu empêcher la catastrophe (position de philosophe juif Hans Jonas). Mais dans ce cas, si Dieu n’est plus celui qui intervient dans l’Histoire, Hitler n’a-t’il pas détruit le Dieu de la Bible ?

    Si la religion de David est invalidée, il ne reste plus que le culte de la Shoah. C’est ce que reproche Benny Lévy à ses frères lorsqu’il les accuse d’avoir fait une idole d’Auschwitz. Ce qui interroge avec la Shoah et le Goulag, c’est la forme prise par le mal, sa banalité comme dit Hannah Arendt.

    Ces destructions ne sont pas le fruit d’un accès de rage barbare, mais d’une froide planification pour obéir à de prétendues lois de l’Histoire ou de la nature. Ceci démontre que l’idéologie du progrès mène à la catastrophe et que le libéralisme a permis le totalitarisme, ils partagent la même volonté d’exploitation de l’homme. A cela s’ajoute la possibilité pour l’homme de détruire l’espèce humaine. La spécificité de la crise actuelle est la conscience de notre disparition probable, pas seulement en tant qu’individu, mais surtout en tant qu’espèce. L’humanisme a fait long feu et les lendemains ne chanteront pas ».

    La barbarie est un anti prochain une forme de contre idéologie de l’amour

    La Barbarie est en soi la manifestation possible d’une puissance démoniaque en ce sens qu’elle est une haine de l’autre, le contraire de « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ».

    Il est parfaitement concevable d’imaginer une volonté démoniaque d’être le contre-pied de l’amour du prochain : L’amour du prochain est à combattre, il ne saurait faire sens. Combien de religions se sont finalement fourvoyées y compris celles d’inspiration chrétiennes en occultant le message fondamental qui est l’amour de l’autre, un amour de l’autre qui est sans conditions. L’amour de l’autre est en effet sans dogmatisme, sans hypocrisie, c’est un amour christique. « Tu aimes ton prochain » dans ce qu’il a de différent.  Ce qui ne  plait pas en lui y compris sa vulnérabilité insupportable, ne doit pas nous conduire à l’aliéner sous prétexte même d’humanisme.

    Le livre d'Ézéchiel évoque la violence du Prince de Tyr rappelant qu’initialement il siégeait auprès de Dieu « Tu as été intègre dans tes voies, Depuis le jour où tu fus créé Jusqu’à celui où l’iniquité a été trouvée chez toi. Par la grandeur de ton commerce Tu as été rempli de violence, et tu as péché; Je te précipite de la montagne de Dieu, Et je te fais disparaître, chérubin protecteur, Du milieu des pierres étincelantes. » Ezéchiel 28 : 11-15 ». L’expression « tu as été rempli de violence », d’une certaine manière orchestre l’influence qu’exerce Satan dans le monde faisant de l’humanité empreinte divine, l’ennemi à abattre.

    Ce constat de cette violence envers la notion du prochain a été décrit par le philosophe espagnol Ortega qui dépeint un autre trait de la barbarie à travers la haine, « La haine sécrète un suc virulent et corrosif. [...] La haine est annulation et assassinat virtuel - non pas un assassinat qui se fait d'un coup ; haïr, c'est assassiner sans relâche, effacer l'être haï de l'existence ».

    Un étudiant posa un jour cette question  à Hannah Arendt « pourquoi appelez-vous « crime contre l’humanité un crime contre le peuple juif ? », elle répondit : « parce que les Juifs sont d’abord des hommes ». Je crois tout simplement que Hannah Arendt résumait parfaitement le propos que nous souhaitons défendre : la Barbarie ne s’inscrit pas comme un crime contre un groupe, une entité ou une catégorie d’hommes, c’est d’abord un crime contre l’homme. Les barbaries que nous dénonçons en témoignant au cours de nos veillées, sur les places publiques où nous nous rassemblons, sont la manifestation de notre attachement à l’être humain, à tout l’être humain. C’est pourquoi nous sommes aussi solidaires à nos frères non seulement chrétiens mais tous ceux qui doivent souffrir au nom de leur foi, de leurs croyances. Cette expression de l’amour est aussi pour les plus vulnérables, les plus fragiles, les enfants, ceux qui sont à naître également, les plus âgés également, les plus dépendants parmi eux.

    Dans cette revue de l’humanité haïe pour des raisons d’identité, Hannah Arendt inscrit le problème du mal radical advenu avec la Shoah dans la perspective de l’universalisme humain.

    La nouvelle Barbarie Occidentale un habillage humaniste

    Le barbare n’est pas seulement l’expression d’une violence d’un individu, ou d’un groupe d’individus, elle peut résulter d’une organisation qui peut habiller sa barbarie en la justifiant de concepts humanistes.

    Comme nous l’avons par ailleurs rappelé précédemment la notion même de barbarie n’est pas nécessairement l’antithèse de la civilisation. La barbarie peut être le produit de la civilisation, Montaigne ne dit  pas autre chose.

    Notre civilisation n’est-elle pas entrée dans une crise profonde. Cette crise qui annonce une forme de délitement des valeurs morales peut générer comme le décrit Montaigne « le cannibalisme du Royaume » de nouvelles violences non nécessairement produits par les fanatismes religieux, mais par des dogmatismes idéologiques, comme ce fut d’ailleurs le cas avec le marxisme-léniniste, le nazisme.

    Il est étrange que l’Europe démocrate qui a combattu les idéologies barbares, caressent aujourd’hui les idéologies mortifères, malthusiennes qu’elle voulait combattre jadis.  

    Comme me le partageait un ami « Nous dénonçons, à juste titre, la barbarie de certains fondamentalistes musulmans, mais que leur répondre quand, à leur tour, ils dénoncent la barbarie de certaines pratiques occidentales comme celle consistant à aspirer l'enfant dans le ventre de sa mère, comme c'est le cas lors d'un avortement ? Cet acte est-il plus "digne" que l'excision que nous dénonçons chez eux… ». Mais nous le réécrivons : rien ne vient gommer ou légitimer tout acte de violence et ce quelle que soit la culture qui la promeut, occidentale ou non.

    Cette civilisation occidentale puisqu’il faut aussi parler d’elle, sombre en réalité et subrepticement dans la barbarie. Nous devons être prudent sur les leçons données par l’Occident laïque et démocrate qui s’arroge, s’accommode de donner des "leçons de civilisation à l’ensemble de la Planète".

    Notre civilisation occidentale a développé des concepts normatifs pour évoquer la barbarie (Génocide, camps de concentration, Euthanasie, Eugénisme, les Lebensborn …) mais est sur le point de réintroduire, de reproduire, de répliquer ceux qu’elle considérait comme une atteinte à l’humain et n’ose qualifier par exemple de barbarie l’atteinte à l’enfant conçu dans le ventre d’une mère ou l’eugénisme en sélectionnant l’enfant à naître si ce dernier correspond aux dimensions normatives de la société occidentale.

    La GPA réintroduira une forme de darwinisme social. D’ailleurs la récente actualité ne l’a-t’ elle pas démontrée ? Cette même GPA est susceptible de détruire la notion de filiation, de créer des troubles identitaires comme ce fut le cas avec les Lebensborn qui ont été dévastateurs pour des enfants qui n’ont pas connu l’affection paternel et maternel. L’actualité n’a-t-elle pas mis à jour ces nouvelles formes de Lebensborn, ces cliniques et maternités ou des femmes pauvres accueillies, marchandent leurs corps au profit de couples en manque d’enfants ?

    La GPA, si ce dispositif est mis en œuvre, violera le droit des enfants à avoir un père et une mère biologique et exploitera les femmes sans ressource et dans le besoin pour donner satisfaction aux désirs de deux adultes, lesquels pourront rejeter cet enfant s'il n'est pas "conforme" aux normes en vigueur, comme on l'a vu récemment en Australie et en Angleterre.

    Faut-il également évoquer dans les arcanes des pouvoirs publics, ces réflexions menées sur l’euthanasie pour abréger les souffrances, l’incurabilité au lieu d’accompagner le mourant au travers des soins palliatifs. L’euthanasie dont les pratiques humanistes pourraient bien couvrir des raisons purement "économiques".

    L'avortement (quoi de plus barbare qu'un tel acte, même si on peut excuser la femme qui le commet et qui, bien souvent, n'a pas le choix ?), la GPA, la théorie du genre dans sa version extrême le "queer" (qui conduira comme nous le développons plus loin à une sexualisation de l'enfance s'il est vrai que l'identité sexuelle est déconnectée de tout rapport au "corps sexué"), tout cela témoigne alors d'une plongée dans la barbarie.

    Ainsi la "Queer theory" de Judith Butler, fait du travesti la nouvelle norme venant se substituer à l'hétérosexualité, déconstruite comme pure convention sociale, et dont on peut craindre qu'elle ne conduise, à terme, à cautionner des pratiques comme celles de la pédophilie puisque si le "corps sexué" ne signifie plus rien, il ne faudra bientôt plus attendre la puberté pour reconnaître une forme de "sexualité" aux enfants et abuser d'eux sous couvert d'un consentement qu'il leur sera bien difficile de refuser aux adultes, comme l'a illustré une affaire récente en Italie". C'est sûr que c'est assez crû, mais mieux vaut prévenir et alerter que guérir !

    Comme nous l’avons écrit à propos et à l’instar de Montaigne, la barbarie n’est pas l’apanage des seuls extrémistes, la barbarie des civilisés, des cols blancs  peut s’avérer aussi  abject que la barbarie des fondamentalistes qu’elle condamne. Nous condamnons explicitement ces deux barbaries, ces deux tyrannies qui aliènent l’être humain.

    Sans oublier que les incivilités les plus insignifiantes sont les premiers pas vers la barbarie. Or, qui parmi nous pourrait affirmer qu’il est exempt de toute ignominie, qu’aucune flétrissure ne l’a jamais atteint ? Les Ecriture (la Bible) évoquent que toute chair est corrompue et que nous portons tous des germes de barbarie. 

    Face à la barbarie, la compassion ou la vengeance ?

    Face à la barbarie, la prière évoquée dans le Psaume  63 respectivement aux versets 10-12 : Qu’ils aillent à la ruine ceux qui en veulent à ma vie! Qu’ils rentrent dans les profondeurs de la terre! Qu’on les passe au fil de l’épée... ne revêt-elle pas une forme de légitimité ? N’y-a-t-il pas une forme d’imprécation angélique que d’en appeler à aimer malgré tout, ses ennemis ? Mais ne serions-nous pas les reflets, les miroirs des barbares que nous accusons ? Mettons fin au cycle de la violence !

    Face à la barbarie, la vengeance (se faire justice) est d’emblée totalement inadaptée; elle serait même amplificatrice de la cruauté. La réponse adaptée est celle de la justice (rendre justice), une réponse pour mettre fin au cycle de la violence. La justice est un principe moral qui relève même d’une dimension de transcendance; elle fait appel à des valeurs universelles.

    Enclencher la guerre, déclarer la guerre pour mettre fin à la guerre, à la barbarie, nous comprenons que cela fut légitime au cours de notre histoire; c’est la tentation de toujours, c’est cette logique de pensée qui a amené le déluge. Le déluge est décidé par Dieu mais il ne résout en réalité rien. La pédagogie du déluge, s’est avérée inadaptée, inefficace, le mal est sans doute beaucoup plus grave et nécessite une transformation volontaire et non une destruction subie de l’homme.

    Lisons cette déclaration étonnante dans le livre de Genèse « Je ne recommencerai plus à maudire le sol à cause de l’homme, car le produit du cœur de l’homme est le mal, dès sa jeunesse. Plus jamais je ne frapperai tous les vivants comme je l’ai fait ! ». Dieu décide d’abolir à jamais le déluge et envoie le signe d’un arc en ciel qui annonce la fin de toute destruction. L’arc en ciel préfigure la croix qui annonce le pardon et par son pardon, la transformation de l’homme.  Voilà la justice de Dieu, le choix de Dieu de sauver l’homme, malgré la barbarie, le cœur corrompu, la violence de son âme. Dieu choisit le salut de quiconque afin que celui qui croit ne périsse pas (Jean 3 : 16).

    Pour conclure comment ne pourrais-je pas penser à cette conclusion de ce texte admirable écrit par Natalia TROUILLER « Frère de France, sœur d’ici, allume une bougie et veille pour l’enfant que j’ai vu en Irak, et pour le salut de celui qui l’a tué…. »

    « L’enfant que j’ai vu en Irak, je l’ai revu quelques jours après être rentrée, sur une photo entourée de roses envoyée par ses parents : c’était sa dernière image vivant, souriant, beau, endimanché. Il avait été coupé en deux par un tir de mortier lors de la prise de Qaraqosh. L’enfant que j’ai vu en Irak, je l’ai cherché, pleine d’angoisse, parmi les centaines de photos prises là-bas pour savoir s’il était de ceux qui ont ri avec moi – la réponse importe peu. L’enfant que j’ai vu en Irak, j’ai reçu la photo de lui, coupé en deux avec du sang partout, envoyée par un djihadiste sur mon compte Twitter.

    Frère de France, sœur d’ici, allume une bougie et veille pour l’enfant que j’ai vu en Irak, et pour le salut de celui qui l’a tué. »

    Cette prière qui semble insignifiante est finalement celle qui a le pouvoir de mettre fin au cycle de la barbarie.

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  • Commentaires

    1
    galvez
    Mardi 16 Septembre 2014 à 06:11

    à méditer

    2
    Jeudi 18 Septembre 2014 à 19:35
    Barbarie, déni violent de l'altérité, violence physique et violence symbolique, oui.

    La singularité du christianisme est d'avoir proposé une alternative à la violence sacrificielle par la célébration de la mémoire d'un sacrifice.

    Ce qui est extraordinaire c'est l'adhésion qu'à recueilli cette proposition, inspiratrice et matrice de notre civilisation et de nos espoirs de paix.Référence à Montaigne oui, car depuis le XVIII ème siècle nous sommes dans les dépendances et contre dépendances (Lucien Sfez - la politique symbolique)
    Montée des barbaries, montée des hégémonies, libre toujours à chacun de se saisir de la proposition
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