• Un virage vers la post-démocratie

    Un article d'Alain LEDAIN

    « Le gouvernement s’est engagé à ‘s’appuyer sur la jeunesse pour changer les mentalités‘… » – Vincent PEILLON, Ministre de l'Education Nationale, dans une lettre du 4 janvier 2013 adressée aux recteurs d’académies.

    « Un module de formation à l’égalité et à la déconstruction des stéréotypes sera obligatoire dans les futures écoles supérieures professorales et dans la formation des autres personnels de l’éducation. » – Najat Vallaud-Belkacem

    Voilà deux textes qui promettent une rééducation de nos enfants… et des enfants qui nous rééduquent, car notre mentalité doit changer ! Nous sommes, en effet, de vilains homophobes et d’affreux sexistes.

    Alors qu’il y a une crise de la transmission, une crise de passation de notre héritage à la nouvelle génération, on s’engage à renverser l’ordre naturel : les enfants seront utilisés pour changer la mentalité de leurs parents.

    Est-ce bien ce programme que nous attendons de l’Etat et de l’école ? Que penser d’un Etat qui s’engage à changer la pensée de ses administrés ? Est-il encore démocratique ? N’observe-t-on pas ici un virage vers la post-démocratie avec sa pensée unique et ses inquisiteurs ?

    Je suis étonné que la plupart des médias ne réagissent pas plus que ça... à moins qu'ils ne se comportent déjà comme les gardiens de la « bien-pensance », comme une « police de la pensée » avec ses lynchages médiatiques !

    On le constate trop souvent : la caricature, la méchanceté et la dérision tiennent lieu de réflexion… Réfléchir, vous le pouvez mais vous devez exprimer vos pensées en novlangue, sous peine d’être vaporisés, c’est-à-dire médiatiquement exécutés et oubliés.

    Une parenthèse est ici nécessaire pour rappeler ce qu’est la (ou le) novlangue. Son nom vient du roman « 1984 » de George Orwell publié en 1949. C’est un langage dont « chaque jour, des mots, des vingtaines de mots, des centaines de mots » sont détruits avec pour but de rendre « littéralement impossible le crime par la pensée car il n’y aura plus de mots pour l’exprimer », un langage où les mots sont redéfinis et peuvent même prendre un sens opposé à leur signification initiale.

    En 2013, le mot « égalité » semble y appartenir.

    Bien évidemment, je défends ardemment l’ « égalité en dignité et en droit » qui est un principe constitutionnel inscrit dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Mais il ne faudrait pas en oublier les expressions « en dignité » et « en droit ». L’ « égalité en dignité et en droit » s’applique à tout homme par rapport aux autres. Elle est abusivement étendue à l’ « égalité de toutes les situations ». D’où le malentendu à propos du mariage pour tous : On crie à la discrimination, ultime péché de la religion « égalité ».

    Pourtant, « on ne peut pas donner droit au mariage à tous ceux qui s’aiment » : « Par exemple, un homme ne peut pas se marier avec une femme déjà mariée, même s’ils s’aiment. De même, une femme ne peut pas se marier avec deux hommes, au motif qu’elle les aime tous les deux et que chacun d’entre eux veut être son mari. Ou encore, un père ne peut pas se marier avec sa fille même si leur amour est uniquement paternel et filial. » On le voit : « l’autorisation du mariage homosexuel maintiendrait des inégalités et des discriminations à l’encontre de tous ceux qui s’aiment, mais dont le mariage continuerait d’être interdit. » (‘Mariage homosexuel, homoparentalité et adoption : Ce que l’on oublie souvent de dire.’ – Gilles Bernheim, Grand Rabbin de France)

    * * *

    L’égalité n’est plus une valeur positive quand elle signifie uniformité, conformisme, confusion, non-reconnaissance de la différence.

    En Océania où règne un terrifiant totalitarisme, George Orwell décrit l’idéal fixé par le Parti : créer une nation de fanatiques qui pensent les mêmes pensées, qui clament les mêmes slogans… des  millions d’êtres aux visages semblables

    Est-ce à cela que mènera la « passion pour l’égalité » ?

    * * *

    Cette passion s’étend à l’intime de chaque humain : à son genre (masculin ou féminin)…

    En 1840, Alexis de Tocqueville publiait le deuxième tome de son livre « De la démocratie en Amérique ». On peut y lire : « Il y a des gens en Europe qui confondant les attributs divers des sexes, prétendent faire de l'homme et de la femme des êtres, non seulement égaux, mais semblables. Ils donnent à l'un comme à l'autre les mêmes fonctions, leur imposent les mêmes devoirs et leur accordent les mêmes droits ; ils les mêlent en toutes choses, travaux, plaisirs, affaires. » (Chapitre XII – Comment les américains comprennent l’égalité de l’homme et de la femme.)

    Ce texte est d’un prophétisme étonnant.

    Et Tocqueville de poursuivre : «  On peut aisément concevoir qu'en s'efforçant d'égaler ainsi un sexe à l'autre, on les dégrade tous les deux ; et que de ce mélange grossier des œuvres de la nature il ne saurait jamais sortir que des hommes faibles et des femmes déshonnêtes. »

    Comme je l’ai déjà écrit, il est compréhensible que les femmes réagissent à la violence des hommes, à leur discrimination, au machisme, à l’autoritarisme, au patriarcat… en résumé, à la domination de l’homme qui est, selon la Bible, une conséquence du péché (Gn 3 : 16). Il faut encore ajouter que la grande pauvreté « touche de plus en plus majoritairement des femmes contraintes d’assumer seules la charge d’une famille. Seules, à cause de la fragilité des unions et, il faut bien l’admettre, à cause de ce qui ressemble à un égoïsme mieux partagé par les hommes… » (« Droits des femmes : chercher l’égalité, ou l’uniformité ? » publié à l’adresse http://www.fxbellamy.fr/blog/2012/12/01/egalite-ou-uniformite/)

    Une profonde repentance doit se vivre chez l’homme, son comportement doit changer et c’est un des rôles de l’Eglise que de l’y amener.

    Aux vrais problèmes rencontrés par les femmes, l’Etat apporte une fausse vision de la femme en l’affirmant, non pas égale, mais identique à l’homme. Les femmes en seront les premières victimes : on les incitera, après avoir été des « garçons manqués », à devenir des « hommes manqués ». L’humanité serait profondément perdante sans une véritable féminité. Aux femmes d’inventer leur style, leur vie en conformité avec leur vocation et leur nature. Si la femme est ontologiquement égale à l’homme, elle ne lui est pas semblable ; ce qui ne signifie pas qu’il y a des inférieurs et des supérieurs, des dominés et des dominants, des seigneurs et des subordonné(e)s !

    Dans cette entreprise de « mélange des genres », l’Etat compte utiliser des méthodes inquiétantes en s’appuyant sur la 'théorie du gender' : Puisque vous et moi sommes d’infâmes sexistes qui nous ignorons comme tels, puisque l’on ne peut plus rien pour nous, il va falloir s’occuper de nos enfants de la maternelle à l’université en leur inculquant l’uniformité des genres masculin et féminin. A l’école, on va leur « réapprendre une autre société. »

    Quand une école rééduque avant  même d’éduquer, elle se fixe un programme post-démocratique et se détourne du service public à des fins idéologiques.

    * * *

    Comme je l’écrivais plus haut, la novlangue, véhicule de la pensée unique, s’appauvrit jour après jour. Je crains qu’il arrive un temps où l’on ne sache plus différencier « égalité » et « indifférenciation ».

    On me rétorquera que j’exagère, que pour l’instant, il ne se semble rien se passer de si grave. Je n’attends pas que « nos élites » installent l’Océania pour réagir car alors, il serait trop tard. Soyons vigilants !

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  • Commentaires

    1
    Eric LEMAITRE
    Samedi 19 Janvier 2013 à 19:12

    J'ai aimé l'intensité prophétique de ce texte, sa dimension interpellante sur l'évolution d'une pensée totalitaire qui se développe par capillarité et en profondeur dans toute notre société....Merci à vous d'avoir partagé avec talent et fulgurance cette réflexion qui traduit un dérapage de l'idéologie pronée par une conception post judéo-chrétienne....

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    2
    ltrobat
    Samedi 19 Janvier 2013 à 19:56

    Pour qu'il y ait égalité il faut qu'existent des différences.

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